Le ballon rond n'a jamais été aussi populaire et YouTube offre aux marques la possibilité d'interagir avec les passionnés de football du monde entier. Pourtant elles sont peu nombreuses à tirer parti de cette opportunité.
Grâce à YouTube, de plus en plus de supporters connectés visionnent des contenus relatifs au football et interagissent avec eux en dehors des horaires officiels des matches. Cette mutation de l'audience, en particulier dans le segment des téléspectateurs occasionnels âgés de 18 à 34 ans, force les marques à redéfinir leur approche du sponsoring.
"Le sport en direct et les chaînes qui le diffusent auront toujours leur place, mais les dépenses publicitaires liées aux contenus axés sur les marques commencent véritablement à s'éloigner des sources traditionnelles", affirme Tom Thirlwall, PDG de Big Balls Media, propriétaire de Copa90, une chaîne YouTube dédiée au football. "75 % des personnes qui visionnent des vidéos de football sur YouTube sont âgées de 18 à 34 ans. Cette audience n'est plus attirée par l'émission de football hebdomadaire, présentée par un vieux briscard en costume qui propose des résumés des matches", ajoute-t-il.
Les Britanniques au première loge
D'après une étude de Tubular Labs, les contenus YouTube relatifs au football génèrent des taux d'interaction plus élevés que les vidéos relatives à la musique, à l'humour et au cinéma. En outre, ce sont les Britanniques qui visionnent le plus de vidéos de football sur YouTube : ils sont 15 %, contre 13 % aux États-Unis et seulement 6 % chez les derniers vainqueurs de la Coupe du Monde, l'Allemagne et le Brésil.
Contrairement à l'idée reçue selon laquelle la capacité d'attention des consommateurs s'amenuise progressivement, la durée de visionnage semble augmenter en matière de football. Selon Tubular Labs, huit des dix annonces les plus populaires diffusées sur YouTube lors de la Coupe du Monde 2014 duraient plus de quatre minutes. "La demande de vidéos de football est bien réelle. Les supporters en visionnent tous les jours et ils trouvent le temps pour des contenus de différentes durées. Par exemple, ils peuvent aussi bien visionner une courte vidéo lorsqu'ils attendent le bus, qu'un contenu plus long sur leur téléviseur via leur console de jeux une fois rentrés chez eux", explique Naomi Harston, Head of sponsorships chez Google UK.
Copa90 collabore avec des marques comme Hyundai et Nissan pour prolonger l'expérience des supporters au-delà des 90 minutes du match. Denis Crushell, EMEA VP chez Tubular Labs, indique ce qui manque aux diffuseurs traditionnels : "Un grand match de football va rassembler quelques millions de téléspectateurs, mais ce pic d'audience retombe immédiatement à la fin de l'événement. Sur YouTube, des chaînes non officielles attirent de très nombreux abonnés, car elles proposent des contenus qui vont bien au-delà des simples résumés de matches."
Même si elles ne peuvent pas diffuser les actions de jeu en raison des droits TV, les chaînes comme Copa90 suscitent l'intérêt des utilisateurs en racontant des histoires que les médias traditionnels ont tendance à délaisser. "Avant le lancement de notre chaîne, on pensait qu'il n'était pas possible de constituer une audience sans détenir les droits de la Premier League. Toutefois, notre objectif était d'utiliser YouTube et d'autres plates-formes numériques pour communiquer auprès des jeunes supporters, dans une démarche totalement différente", explique Tom Thirlwall.
Il y a quelques mois, l'opérateur EE a lancé la "Wembley Cup", une campagne de branding axée sur le football qui constitue un bel exemple de réussite. L'opération consistait à réunir des stars de YouTube afin de jouer un match au stade de Wembley, les équipes étant encadrées par d'anciennes gloires du football, comme Martin Keown et Ray Wilkins. Le match lui-même fait l'objet d'une vidéo de 37 minutes, qui a été visionnée plus de cinq millions de fois, soit davantage que l'audience de la dernière finale de l'UEFA Champions League. Cela démontre une nouvelle fois que les supporters en ligne ne se limitent pas à des contenus de courte durée. "Si l'histoire est bonne et si le lien avec l'audience est fort, le contenu suscite naturellement l'intérêt des utilisateurs", ajoute Tom Thirlwall.
L'authenticité est primordiale
Les supporters souhaitent connaître les coulisses des matches et ne pas se contenter des 90 minutes relatées par la presse. C'est ce qui explique l'immense popularité dont jouissent ce qu'on appelle les "chaînes de fans". Manchester United est le seul club professionnel du Royaume-Uni à ne pas disposer d'une chaîne YouTube officielle. En revanche, les Red Devils occupent le devant de la scène en matière de contenus pour les supporters. En effet, la chaîne FullTimeDEVILS compte plus de 200 000 abonnés, qui peuvent visionner jusqu'à cinq nouvelles vidéos par jour. Selon Tubular Labs, les contenus créés par les fans obtiennent des taux d'interaction presque deux fois supérieurs à ceux des chaînes officielles des clubs.
"Pour les supporters, l'authenticité a beaucoup d'importance. Ils veulent des contenus qui reflètent la réalité et les rapprochent des joueurs qu'ils idolâtrent. Ces chaînes de fans enregistrent une croissance 3,6 fois plus rapide que celle des chaînes des clubs de Premier League", affirme Denis Crushell.
Les entreprises n'ont jamais eu autant besoin d'une stratégie efficace en matière de marketing de contenu, et les marques doivent saisir l'opportunité de susciter réellement l'intérêt des fans. Elles peuvent modifier une création pour l'adapter à l'audience YouTube, tirer parti de technologies comme les vidéos à 360 degrés, utiliser des données en temps réel afin d'ajuster leurs contenus, et exploiter la créativité des fans en ligne ou des créateurs YouTube.
"Contrairement aux sites de sports et de médias traditionnels, la vidéo en ligne ne constitue pas un espace saturé. Par conséquent, les responsables marketing sont face à de réelles opportunités pour sortir du lot, créer un sentiment d'appartenance et accroître le degré de sympathie vis-à-vis de la marque. C'est le moment de les saisir !", conclut Naomi Harston.