Convaincu que l’avenir du modèle alimentaire réside dans la qualité de l’offre, Fleury Michon repositionne la marque autour des valeurs de transparence et de confiance. De 2014 à 2017, le Vendéen et son réseau interagences conçoivent et pilotent une stratégie plurimédia inédite. YouTube est placé au coeur du dispositif pour densifier le discours de preuve et atteindre un reach qualifié. Décryptage de la campagne « Venez Vérifier » avec Guillaume Marolleau, responsable digital de Fleury Michon, et Gilles Meurgey, directeur média TV-digital de l’agence Business.
Double prise de conscience
Besoin de transparence
Tout part d’un insight consommateur : les Français sont prêts à changer leurs habitudes alimentaires, mais ils attendent un effort des industriels. « Parce que notre façon de consommer a changé, il est important de revoir le modèle agroalimentaire et de commencer à montrer des engagements à petite échelle, au démarrage, et à plus grande échelle demain », note Guillaume Marolleau. « Les consommateurs ont besoin de transparence et d’informations. Ils étaient persuadés que le surimi était fait avec des déchets de poisson, mais aussi qu’il était mauvais pour la santé. Le seul moyen de les convaincre était de les faire vérifier par eux-mêmes, car ce sont les meilleurs juges de paix. »
Fleury Michon adopte un discours de transparence et propose aux consommateurs de remonter la filière pour « vivre toutes les étapes de la fabrication du surimi en usine jusqu’aux chalutiers en Alaska. » La première campagne « Venez Vérifier » est lancée.
Essor de la vidéo dans la consommation des médias
« Aujourd’hui, les Français consomment les médias différemment. On ne peut plus dire qu’on ne regarde que la TV ou bien qu’on ne lit que le journal. Il fallait alors réfléchir à un écosystème qui prend en compte autant l’online que l’offline. » TV, cinéma, presse, vidéo online : « notre communication doit être pluricanale, avec l’objectif de connecter la marque avec les consommateurs et d’échanger avec eux. »
Première action digitale de Fleury Michon : la co-construction d’un écosystème global avec l’ensemble des agences : DDB Paris, Business, Digitas et Publicis Consultant. « Pour asseoir un discours de vérité et de transparence, le média, qui nous a semblé le plus utile, était la vidéo. Elle nous permet de rentrer plus dans le détail. » Et Gilles Meurgey d’ajouter : « La vidéo est un contenu immersif avec une vraie force de conviction. C’est la preuve par l’image. Quand on veut dépasser le format de 15 ou 20 secondes, il faut aller sur des plateformes capables de diffuser un message long avec une intrusivité moins forte. » En l’occurrence YouTube.
Expérimenter pour mieux performer
Fleury Michon diffuse en avril 2016 un film marque en télévision, puis au format TrueView Instream sur YouTube. « C’est un contenu où l’on explique les choses aux gens », poursuit Gilles Meurgey, mais aussi « un format hybride, qui fonctionne aussi bien en TV qu’en digital. »
Autour de ce film marque, Fleury Michon construit un écosystème de vidéos preuve sur les engagements pris par la marque. Sont alors mis en avant les 70 références de plats cuisinés sans conservateurs, le surimi sans polyphosphate et sa filière de jambon sans OGM ni antibiotique. Fleury Michon part sur 2 vidéos de 4 minutes par filière. Mais, au-delà d’1min45s, le taux de complétion chute. Changement de stratégie : chaque vidéo est scindée en 2 épisodes d’environ 2 minutes.
Pour engager sa cible, Fleury Michon utilise les techniques de remarketing. Les vidéos sont liées entre elles et permettent aux internautes, qui ont regardé une vidéo (e.g. J’Aime le porc), d’être exposés au film marque, puis à l’ensemble des vidéos de la marque. Un bon moyen de déterminer les contenus qui marchent, ou non, et d’optimiser le coût de la vue.
Coûts en baisse et impact en hausse
6 campagnes, 28 sous-campagnes, 26 vidéos de 55 secondes à 4 minutes sur 5 mois de diffusion. Un dispositif ambitieux pour une marque qui cherche, avant tout, à asseoir son identité d’industriel engagé et embarquer le consommateur dans une prise de conscience. Le point sur les résultats.
Sur l’ensemble de ses campagnes 2016, Fleury Michon enregistre 17,7 millions d’impressions, 6,2 millions de vues (au moins 30 secondes) et 4,2 millions de vues à 100% (durée moyenne 1min38s). Le taux de vue 30 secondes est de 35% (+60% vs. benchmark), tandis que le taux de complétion est de 24%.
Plus encore, le CPV dépasse les attentes. De 4 centimes en 2015, il chute à 2,9 centimes en moyenne en 2016. « Le fait d’employer le retargeting sur plusieurs catégories de sujets a permis d’optimiser le CPV. C’est une grande fierté parce qu’on a un CPV en-dessous de la moyenne avec des formats longs (98 secondes en moyenne). On a réussi en étendant les campagnes et en allant davantage sur le retargeting. »
Autre résultat significatif : le CPM sur cible est inférieur de 16% par rapport à la TV avec un ciblage plus précis et une mémorisation plus forte. « Quand on reconstitue le CPM YouTube par rapport à celui de la TV, sur une cible 25-59 ans, YouTube est moins cher que la TV. C’est important parce que les annonceurs ont souvent l’impression qu’Internet est plus cher que la TV. Ce constat n’est pas vrai quand on a un format de plus d’une minute. »
Enfin, un Brand Lift Survey démontre un impact positif de YouTube sur la connaissance de marque entre les exposés et les non-exposés au contenu preuve (+12% de notoriété et +31% de mémorisation des différentes annonces). Argument « important pour continuer de défendre le budget digital. »
Des learnings stratégiques
Derrière ces résultats, beaucoup de travail et de remise en question. Lors de points hebdomadaires interagences, Fleury Michon challenge les équipes et retravaille sans cesse la mécanique. « On n’hésitait pas à challenger les KPI », indique Guillaume Marolleau. « Cela passait par une actualisation permanente des objectifs et l'adaptation du plan média au fil de sa diffusion avec toujours cette volonté d’optimiser le CPC, le taux de complétion. La réussite des chiffres vient aussi du fait que, à l’inverse de la TV où une fois que c’est calé on ne peut plus trop bouger, le digital permet de rechallenger tous les jours. »
Et Gilles Meurgey de poursuivre : « on n’a pas choisi la voie la plus simple. Être en perpétuel mouvement et changer les choses en cours de route peut être une contrainte forte, notamment par rapport aux équipes qui gèrent la campagne. » Mais, « j’ai l’impression qu’on est allés assez loin dans les possibilités d’architecture de campagne sur YouTube et dans les apprentissages. » Focus sur 7 enseignements clés :
#1. Authenticité. Jouer la transparence jusqu’au bout avec la participation de ses salariés, pêcheurs et fournisseurs dans les vidéos. « La marque a réussi à se faire entendre avec un contenu original et qualitatif », souligne Gilles Meurgey. « C’est assez rare aujourd’hui, car peu de marques osent se mettre à nue. »
#2. Simplicité. Exit les sujets trop techniques (e.g. sur les plats cuisinés). Ils ne fonctionnent pas si bien. « On est revenu aux fondementaux du marketing : vrai, sincère, centré sur l'intérêt du consommateur », note Guillaume Marolleau. « Pas de fake. On devait avoir un discours compréhensible, simple et engagé. On ne disait pas oui, non, peut-être, mais oui ou non. »
#3. Format court ou format long. « Un contenu de plus de 3 minutes, s’il n’apporte pas plus en termes de connaissances, n’est pas utile. »
#4. Attention. « Il faut un film qui accroche bien dès le départ. »
#5. Retargeting. Dans le cadre d’un format long, « la répétition n’est pas très utile ».
#6. Durée de diffusion. Préférer une diffusion plus longue et optimisée dans le temps. « Il faut surtout bien cibler et s’assurer que la campagne cartonne en termes de CPV et de redirection qualifiée. »
#7. Insights consommateurs. Fleury Michon affine ses connaissances socio-démographiques (CSP+, etc.) et comportementales (fans de lecture ou de théâtre, intérêt pour l’écologie, etc.).
« On a réussi, avec des moyens pas forcément colossaux, à avoir une direction qui a du sens », conclut Gilles Meurgey. « On est rentré dans un système qui doit se poursuivre. Il ne faut pas regarder une année, mais 3 ou 4 années à la suite pour voir quels murs on est capables de repousser en termes d’achat média et de création de contenus. »