Les consommateurs se comportent différemment sur mobile. Mais pourquoi les marketeurs éprouvent-ils des difficultés pour réorganiser leurs stratégies relatives au mobile ? Pour communiquer auprès des consommateurs via le mobile, les marques doivent adopter une démarche spécifique. Pourtant, les annonceurs persistent à essayer d'intégrer les communications, le contenu et les données dans la technologie mobile à partir des éléments provenant de la télévision, de la radio et même du mailing, afin de comprendre comment elle fonctionne. Pour optimiser les performances du marketing sur mobile, ils vont devoir mettre un terme à ces vieilles habitudes.
Le marketing sur mobile enthousiasme incontestablement les marketeurs. Début 2014, il était déjà plus courant d'accéder à Internet via mobile que via ordinateur (selon comScore). Dans les pays en développement, les utilisateurs possèdent souvent un téléphone mobile, alors qu'ils partagent leur accès à un téléviseur ou un ordinateur.
"Grâce au mobile, nous pouvons nous spécialiser dans la diffusion ciblée", explique Shaun Gregory, PDG d'Exterion Media. "Les médias sociaux permettent de connaître la réaction de l'utilisateur. Cela s'avère très utile pour un marketeur, car il peut déterminer ce qui fonctionne", affirme Mark Strecker, PDG d'Amobee.
"Je pense que l'intégration de la publicité extérieure dans la sphère des données représente une réelle opportunité, mais il faudra être plus créatif", ajoute Shaun Gregory. Il cite l'exemple de McDonalds : avec le Monopoly, sa stratégie très efficace de ludification s'applique de plus en plus aux différents canaux. De plus, elle inclut désormais des éléments online et de réseaux sociaux, parfaitement adaptés à l'interaction via les mobiles.
Mais l'enthousiasme général est tempéré par de nombreuses interrogations, comme l'ont évoqué les spécialistes à l'occasion de l'Advertising Week Europe.
Les commentaires du directeur marketing de Selfridges, Hazel Kay, risquent de refroidir l'enthousiasme des dirigeants concernant la possibilité de cibler les clients potentiels dans un rayon de quelques mètres grâce au mobile : "Nous partons du principe que les mobinautes ne savent pas ce qu'ils vont faire ensuite. Chacun de nos magasins repose sur notre mission. Je ne suis pas sûr que nous aurons des retombées si nous envoyons un message aux passants". Il est donc évident qu’il faut regarder au-delà des caractéristiques fonctionnelles du téléphone : proximité n'est pas synonyme de rentabilité. Comment optimiser l'interaction ?
Il pourrait être utile de mettre fin à certaines idées reçues. "La publicité extérieure digitale peut être très séduisante, par exemple, mais la réalité est tout autre. Les mobinautes utilisent majoritairement le Web chez eux ou au bureau. Le caractère pratique est l'élément essentiel. Les paiements via mobile et la reconnaissance vocale pour les recherches représentent les fonctionnalités à fort potentiel de croissance", affirme Richard Morris, directeur général de Vizeum.
L'idée selon laquelle il est beaucoup plus facile d'évaluer les performances sur le mobile que sur tout autre support s'avère frustrante, sous deux aspects. D'une part, il existe un argument selon lequel les méthodes utilisées ne sont pas adaptées à la finalité (par exemple, les taux de clics) ou l'exactitude est largement exagérée. D'autre part, on considère que lorsque des méthodes d'analyse moins précises sont évoquées, on commence à se dire que les responsables ne font pas assez d'efforts.
"La modélisation probabiliste revendique une exactitude de 70 à 80 %, mais il faut le prendre avec des pincettes", explique Neil Bruce, Head of Mobile chez Mindshare. "Je suis contrarié lorsque certaines personnes nous renvoient la question de la mesurabilité. Si l'on étudie la façon dont les performances TV sont évaluées, je considère que la mesurabilité sur les mobiles est similaire", ajoute-t-il. Toutefois, les résultats de l'étude SMoX réalisée par la Mobile Marketing Association devraient être bientôt publiés (même si aucune date n'est précisée) et devraient faire avancer cette question.
Les données demeurent un élément essentiel du processus global, et les marques continuent à se demander quelle est la meilleure manière de les obtenir. D'une façon générale, on estime que pour collecter des données, on doit fournir une contrepartie (ou "échange de valeurs") au consommateur. En réalité, pour susciter l'intérêt sur la plate-forme mobile, il convient de fournir un contenu contextuel de grande qualité, qu'il soit clairement de nature promotionnelle ou non. La publicité native rencontre un succès croissant. Par exemple, la campagne du tour-opérateur TUI s'avère particulièrement efficace. Elle consiste à afficher des arrière-plans associés à la marque, représentant une plage ensoleillée, devant les prévisions météorologiques déprimantes affichées en temps réel dans l'application de la chaîne météo The Weather Channel.
"Il faut révolutionner la méthode de diffusion des annonces sur les mobiles. Nous avons besoin de nouvelles solutions, reposant sur trois principes fondamentaux : le choix donné à l'utilisateur, une publicité attirante et l'échange de valeurs", résume Peter Dille, directeur marketing de Tapjoy.