Témoins privilégiés du CES 2017 à Las Vegas, Roland Duffau, Industry Head, Telecom & Media chez Google France, et Philippe Vincens, Industry Head, Banking & Insurance chez Google France, reviennent sur les tendances émergentes du plus grand salon high-tech au monde. Intelligence artificielle, réalité virtuelle et voiture autonome : l’avenir se joue maintenant.
50 ans d’innovations
De 117 exposants en 1967 à New York à 3 800 exposants en 2017 à Las Vegas. De 17 500 à 170 000 visiteurs. De la TV en noir et blanc à l’intelligence artificielle. Cinquante ans que l’innovation bat son plein pour imaginer le quotidien de demain. « Le CES reste sans conteste le premier salon au monde pour prendre le pouls des tendances technologiques de demain et même d’après-demain, tant le rendez-vous est encore un incontournable pour l’ensemble des acteurs de la planète tech », note Roland Duffau.
« S’il était une question à laquelle j’espérais trouver des éléments de réponse, c’est sans doute de savoir si l’intelligence artificielle était toujours un mythe, réservé aux chercheurs et aux joueurs de Go, ou enfin devenue une réalité susceptible de concerner le mass market. »
Carrefour des tendances
Voiture autonome, IoT, réalité virtuelle, intelligence artificielle, machine learning ou encore assistant personnel : si le CES est le salon de l’électronique grand public, la 50ème édition aurait pu être rebaptisée « salon de la rencontre », précise Philippe Vincens. « Parce que, pour la première fois aux yeux de tous, l’intelligence artificielle a rencontré le monde de l’Internet des Objets et ses myriades de déclinaisons. À commencer par l’automobile, mais également le petit et le gros électroménager, les équipements personnels, les accessoires de mode, etc. À ce jeu, c’est bien Amazon qui a frappé un grand coup par son omniprésence et la diversité de ses intégrations. »
Mais aussi « parce que la réalité virtuelle est allée au-delà du traditionnel monde du gaming (sans le quitter, bien entendu) pour s’aventurer dans des domaines d’application très variés : information, sport, santé et bien sûr le retail. Sur ce dernier cas, et en dépit d’un stand encore très modeste (plus pour longtemps ?), Alibaba proposait des expériences particulièrement prometteuses. »
Évolution ou révolution ?
Quand le CES 2016 se distingue par l’annonce de technologies rupturistes, l’édition 2017 va plus dans le sens du développement et de l’amélioration continue de celles-ci. « La production technologique était plus evolutionary que revolutionary », confirme Philippe Vincens. « Pas de killer app ni d’invention fondamentale d’un point de vue produit. En revanche, une tendance de fond était palpable sur le salon. Une tendance précurseur d’une véritable révolution à venir : la démocratisation de la voiture autonome. »
Et de poursuivre : « les constructeurs traditionnels étaient presque tous au rendez-vous, s’accaparant l’espace et les buzzwords pour présenter leurs concept cars et l’expérience de demain. Au-delà de ces promesses, la nouveauté venait sans doute des partenariats avec les acteurs tech : Ford avec Amazon, Chrysler avec Google, Nissan avec Microsoft, par exemple. Et l’entrée en jeu d’acteurs historiquement très éloignés du secteur, comme Nvidia, qui a annoncé un partenariat avec Audi et BMW pour le développement d’une voiture autonome. »
Nul doute que les prochaines éditions du CES feront la part belle aux activités proposées dans ces voitures autonomes (e.g. divertissement, information, etc.).
L’usage fait la force
Pas de CES sans lancement de smartphones toujours plus performants, résistants, rapides et économes en énergie. Exception faite en 2017 : « cette année, pas de lancement en grande pompe ni de keynote hollywoodienne par les constructeurs de smartphones », souligne Roland Duffau. « Les habitués des grand-messes, qui accompagnent leurs releases majeures, ont sans doute été déçus, et se rattraperont au Mobile World Congress. »
La révolution mobile ne résiderait-elle pas dans les usages ? Certes. Mais quels usages ? « D’abord, la réalité augmentée, avec l’apparition d’applications intéressantes comme celles embarquées par Asus dans le nouveau Zenfone 3 Zoom compatible Daydream et Tango. De quoi rivaliser avec les nombreux casques présentés dans le salon par de grandes marques telles que Sony, Panasonic et Lenovo ou une multitude de nouveaux acteurs. »
Et, au-delà de la désormais classique interaction avec les objets connectés, citons les premières intégrations de l’intelligence artificielle. « En témoigne le partenariat entre Huawei et Amazon, qui a permis d’équiper le nouveau Mate 9 du service d’assistant vocal Alexa. » De belles perspectives s’ouvrent pour un équipement désormais ultra-démocratisé.
French Touch, French Tech
Troisième délégation mondiale après les États-Unis et la Chine, la France recense 233 startups, dont 178 dans l’Eureka Park. Cocorico : plus d’un startuper sur trois y parle la langue de Molière ! « L’excellente représentation des startups françaises au CES était à l’image de la vivacité de l’écosystème de ce pays », commente Philippe Vincens. « Discerner les startups, qui produisent des gadgets, des véritables pépites technologiques émergentes n’est pas un exercice évident. Néanmoins, la France est ultra-active dans le domaine des objets connectés comme en témoignent les success stories de Withings, racheté par Nokia, et de Netatmo, dont la levée de fonds atteint 30 millions d’euros. »
Au-delà des startups, la France était aussi largement représentée par de grands acteurs traditionnels. Preuve du virage digital abordé par l’ensemble de l’écosystème français, notamment La Poste et son hub digital, plateforme de services et d’objets connectés en partenariat avec Malakoff Médéric, ou encore BNP Paribas Real Estate, Derichebourg multiservices et Boulanger.
CES 2018, bien sûr !
Pas de lancement de produit révolutionnaire cette année, mais des enseignements sur les tendances de demain. « La principale étant sans doute l’intégration, des marques comme des catégories », explique Roland Duffau. « Plus que jamais, les silos technologiques tendent à disparaître au profit d’une expérience enrichie à l’accès simplifié (en partie grâce à l’IA), depuis un équipement unique (e.g. smartphone, voiture ou réfrigérateur). Cela se traduit par une multiplication des partenariats et une explosion des use cases désormais accessibles à tous, partout. »
Alors, oui. Le CES reste un must-go pour « sentir les changements, toucher du doigt les mouvements structurels, qui fédéreront le monde de demain, et échanger avec les acteurs de cette (r)évolution en marche. »
Rendez-vous dans un an !