Les données ne sont réellement utiles que si on les converti en informations exploitables. Mais qu'attendons nous vraiment des données ? Il faut d'abord déterminer leur valeur. Quelles questions se poser concernant le contexte, les besoins, la stratégie et le résultat des données ? Nous proposons un cadre de référence utile pour transformer ces dernières en histoires intéressantes, au coeur de la réussite de l'entreprise.
En 1910, l'écrivain et poète écossais Andrew Lang disait : "Il utilise les statistiques comme l'ivrogne les lampadaires, pour s'appuyer plutôt que pour s'éclairer". Plusieurs décennies plus tard, de nombreux responsables d'entreprise continuent d'agir de la sorte, en se servant des données pour corroborer leurs décisions plutôt que pour les dicter.
Pourquoi ? En fin de compte, les données ne sont réellement utiles que si elles aident l'entreprise à prendre de meilleures décisions. Même si votre entreprise est en possession d'un nombre incalculable de données, celles-ci seront inutiles si vous n'aez pas la possibilité de les convertir en informations stratégiques servant de moteur à votre entreprise.
Dans cet esprit, nous proposons ici quelques mesures importantes à prendre pour faire des données des informations exploitables.
Définissez les données
Pour obtenir des informations efficaces, commencez par vous demander ce que vous souhaitez que vos données vous apportent, et donc par déterminer leur valeur. Réfléchissez à ce que vous voulez faire des valeurs réelles. Dans son livre intitulé Thinking with Data, Max Shron propose un cadre de référence utile pour limiter le champ d'application d'un projet, comme l'analyse des données. Un projet est comparable à une histoire : il inclut toujours une situation initiale (le contexte), un événement déclencheur (les besoins), une résolution (la stratégie) et, si tout va bien, une fin heureuse (le résultat).
Les réponses aux questions suivantes vous aideront à élaborer le meilleur plan possible pour utiliser vos données.
- Contexte : quel objectif essayez-vous d'atteindre ? Qui est impliqué dans les résultats du projet ? Existe-t-il des objectifs plus larges ou des échéances plus lointaines qui peuvent permettre d'établir le niveau de priorité du projet ?
- Besoins : à quels besoins spécifiques l'utilisation intelligente des données pourrait-elle permettre de répondre ? Quelles actions, qui étaient auparavant impossibles, ce projet permettra-t-il de réaliser ?
- Stratégie : en quoi consiste la satisfaction des besoins concernant les données ? Est-il possible de simuler le résultat final ? Sur quelle logique la solution repose-t-elle ?
- Résultat : comment et par qui le résultat sera-t-il utilisé et intégré dans l'entreprise ? Comment la réussite du projet sera-t-elle évaluée ?
Établissez un cadre de référence
J'ai récemment écrit un article sur la façon d'utiliser les données pour raconter des histoires intéressantes (en anglais), mais comment trouver la bonne histoire à raconer ? Les architectes constituent une source d'inspiration utile. À l'instar de ces derniers, qui doivent donner vie à des demandes de conception abstraites, les responsables marketing doivent transformer les données en informations exploitables.
Le processus de compréhension et de visualisation des données est similaire à la méthode qu'utilise un architecte pour réaliser ses croquis lors de la phase de conception. Lorsque nous créons différents schémas, graphiques et tableaux, c'est comme si nous avions une conversation avec les données. Nous pouvons ainsi nous familiariser avec les chiffres, afin de trouver des informations intéressantes.
Dans un article captivant paru dans le New York Times, Michael Graves, professeur d'architecture émérite à l'Université de Princeton, rejette l'idée selon laquelle la technologie aurait provoqué la "mort du dessin" dans l'architecture. Il explique que le dessin correspond autant à un procédé qu'à un produit final, et que même si l'ordinateur a toute sa place, le facteur humain/émotionnel est tout aussi important. Il décompose le dessin d'architecture en trois types : le "croquis de référence", l'"étude préparatoire" et le "dessin définitif". Il est intéressant de constater que son point de vue sur chacun de ces éléments est lié à la façon dont les marketeurs abordent la question des données.
Je vais maintenant établir un rapprochement entre les théories de Michael Graves sur le dessin d'architecture et le processus visant à rendre les données exploitables :
1. Croquis : trouvez l'inspiration
Débutez la conversation initiale avec les données de façon conceptuelle, à l'aide d'une feuille et d'un crayon pour faire un croquis. Notez les concepts de réalisation ou les idées générales concernant le résultat souhaité. Par exemple, alors que je préparais une série de graphiques pour un article, j'ai dessiné le croquis ci-dessous, qui a servi de base pour la conception et la structure du schéma définitif.
2. Préparation : étudiez consciencieusement les données
Cette étape peut débuter avec une feuille et un crayon, mais elle évoluera certainement vers votre logiciel d'analyse et de visualisation, au fur et à mesure de l'exploration des données. Tenez compte des éléments suivants pour réfléchir à la façon d'aborder les données :
- Filtrage : allez droit au but et concentrez-vous sur le thème le plus important.
- Tri : classez les données par ordre d'importance.
- Regroupement et segmentation : récapitulez les données et formez différents groupes.
- Visualisation : donnez vie aux données à l'aide de visuels intuitifs.
Les architectes se préparent de façon similaire, alternant entre croquis en 2D et plans en 3D. Même si un croquis peut être approprié et acceptable en soi, il ne prend vie que sur le terrain. Dans l'univers des données, la même situation se produit lors de leur traitement. Il arrive que leur format soit incorrect, ou qu'elles soient imprécises ou incomplètes. D'où l'importance de toujours valider votre "préparation" avec des données réelles.
3. Visualisation : donnez vie aux données
La visualisation peut être utile lors de la transformation des données en informations exploitables. Comme l'a dit le mathématicien John Tukey, "les quantités numériques sont axées sur les valeurs attendues, tandis que les résumés graphiques portent sur les valeurs inattendues". Il avait mis le doigt sur la chose suivante : l'efficacité réelle de la visualisation repose sur sa capacité à présenter des résultats inattendus de façon claire et intelligible. Pour vous aider à donner vie à vos données, plusieurs outils d'analyse et de visualisation sont disponibles, dont Google Analytics.
Les principes suivants vous aideront à utiliser un processus de visualisation offrant des informations probantes :
- Soyez attentif à l'esthétisme : l’oeil est naturellement attiré par la beauté, veillez à ce que vos graphiques soient aussi beaux que possible. L'esthétisme peut également permettre de faciliter la compréhension des graphiques, en mettant le doigt sur l'action qui en résulte. Pour plus d'informations sur l'importance de l'esthétisme, n'hésitez pas à consulter l'article de Stephen Few intitulé Now You See It, Simple Visualization Techniques for Quantitative Analysis.
- Concentrez-vous sur les tendances, et non sur les données mesurées : les meilleurs renseignements sont souvent obtenus en étudiant les tendances (en particulier lorsqu'elles changent d'orientation) et non les mesures individuelles.
- Comparez des périodes : examinez différentes plages de dates (par exemple, deux semaines, deux mois ou deux étés). Veillez toutefois à utiliser des périodes similaires : comparer les mois de mars et février peut causer des problèmes, car ils ne comptent pas le même nombre de jours.
- Essayez d'identifier des liens étroits entre les éléments : dans le cadre de l'analyse des données, les observations les plus utiles et intéressantes reposent souvent sur les relations entre les variables, ou sur la corrélation et la dépendance pour les statisticiens.
- Testez différentes approches : un même individu ne pouvant pas tout voir, invitez d'autres personnes à examiner les données. Il est essentiel que plusieurs paires d'yeux recherchent les informations exploitables.
- Faites preuve de scepticisme : analysez toujours les données sous au moins deux angles. Par exemple, vous pouvez représenter graphiquement les données plusieurs fois, par le biais de différents types de diagrammes. Les données peuvent nous induire en erreur. Alors veillez à raconter les faits avec précision.
La découverte de la perle rare dans les données peut demander un peu de travail, mais elle est bien utile pour la visualisation. La liste ci-dessus est loin d'être complète, car elle n'inclut que quelques exemples des techniques de visualisation les plus efficaces. Prenez le temps de trouver votre propre combinaison optimale.
Des données à l'action
J'espère que le cadre de référence et les principes décrits dans cet article vous aideront à tirer des enseignements de vos données. Vous pourrez ainsi exploiter ces dernières pour trouver l'inspiration, afin d'élaborer un récit qui vous permettra de dynamiser votre entreprise. Tous les principes ne s'appliquent pas forcément à tous les contextes. Vous devez donc déterminer les meilleures techniques qui vous permettront de mettre au point votre analyse des données.
La transformation des données en informations exploitables peut représenter un processus non structuré. Heureusement, il existe différentes techniques pour aider les professionnels à passer des besoins en termes de données à des informations exploitables. Pour utiliser efficacement les données, les marketeurs doivent établir des lignes directrices, comme l'architecte élabore un plan. Il n'y a toutefois aucune raison de ne pas adopter une démarche créative.