Inspirées par l’élan de créativité et d’innovation du Salon Viva Technology 2019 à Paris, Maria Gräfin von Scheel-Plessen, Global Head of Media, Montblanc, et Anne-Véronique Baylac, Directrice du secteur Luxe, Google France, échangent sur les défis et opportunités du digital pour une maison de luxe, au savoir-faire ancré dans le passé et aux stratégies de communication tournées vers l’avenir.
Comprendre l’histoire de la marque pour mieux s’adapter à la nouvelle génération
Anne-Véronique Baylac : Créée en 1906 à Hambourg, la société Montblanc est alors un modeste atelier de stylos. Plus d’un siècle plus tard, elle est une marque de luxe de dimension internationale, connue pour ses emblématiques stylos Meisterstück et sa gamme d’instruments d’écriture et de montres.
Comment Montblanc fait le lien entre le traditionnel et le contemporain ? Surtout si l’on considère la prochaine génération d’acheteurs, id est les millennials et la Génération Z, que toute marque de luxe cherche à séduire ?
Maria Gräfin von Scheel-Plessen : nous sommes conscients que la prochaine génération, composée des millennials et de la Génération Z, dessine l’avenir des acheteurs de luxe, et que la définition du luxe per se a changé. De plus en plus, le luxe se vit au-delà du produit et s’apparente à un état d’esprit et à un mode de vie. Nous devons prendre en compte ces deux dimensions. Pour rester pertinents, nous devons mettre en avant notre proposition de valeur à travers l’héritage de la marque, à savoir son histoire et son savoir-faire artisanal. Nous devons également éveiller de vraies émotions et créer des expériences engageantes via une communication personnalisée.
De plus en plus, le luxe se vit au-delà du produit et s’apparente à un état d’esprit et à un mode de vie.
Décoder les nouveaux besoins des acheteurs de luxe
Le digital influence indiscutablement la manière dont les acheteurs de luxe choisissent les marques et les produits. Son impact se ressent sur le produit lui-même. Comment le digital influence les catégories de produits de Montblanc ?
Maria Gräfin von Scheel-Plessen : le digital influence le comportement des consommateurs, et nous observons un basculement rapide vers des produits qui ont du sens et améliorent le quotidien. Concrètement, ils sont de véritables compagnons de vie et nous permettent de nous recentrer sur ce qui nous est le plus précieux : le temps, les amis et la famille. Ainsi, nous diversifions nos produits pour résonner auprès de toutes les tranches d’âge. Illustration avec Summit, notre première montre connectée de luxe lancée il y a 1,5 an. Sa nouvelle version, Summit 2, embarque le système d’exploitation Wear OS de Google. Autre exemple : l’Augmented Paper vous permet de transférer vos notes manuscrites et autres esquisses du papier vers votre smartphone. Et de les modifier à l’envi.
Plus généralement, nous voyons une vraie tendance vers l’offline, un retour en force de l’art d’écrire des lettres et de l’expression personnelle à travers l’écriture.
Le digital influence le comportement des consommateurs, et nous observons un basculement rapide vers des produits qui ont du sens et améliorent le quotidien
Gérer les parcours omnicanaux
Près de 80% des ventes de luxe sont aujourd’hui influencées par le digital, et ce pourcentage devrait passer à 100% dans quelques années. Les consommateurs utilisent un ou plusieurs points de contact digitaux au cours de leur parcours d’achat luxe. En tant que Global Media Manager de Montblanc, comment abordez-vous cette opportunité ?
Maria Gräfin von Scheel-Plessen : cette opportunité s’accompagne de l’émergence de nouveaux parcours de luxe expérientiels et du besoin de personnalisation dans la publicité. Nous avons moins de temps, une attention moins soutenue. En une seconde, il faut convaincre l’utilisateur d’engager avec votre marque.
Je privilégie l’implémentation d’un ciblage très fin, notamment à travers l’achat programmatique avec Google pour le lancement de notre smartwatch. Nous avions alors un ciblage spécifique via la plateforme DV360 et segmentions notre communication en fonction des centres d’intérêt, de l’âge et de l’avancée dans le tunnel de conversion.
Nous commençons également à mesurer l’impact des investissements digitaux sur les ventes offline, l’une des solutions utilisées étant Store Sales Direct aux États-Unis.
En somme, plus de produits et de services personnalisées pour nos clients.
Préparer l’avenir
En conclusion, quels sont les principaux défis digitaux rencontrés par Montblanc ?
Maria Gräfin von Scheel-Plessen : mon principal défi concerne le monitoring et le pilotage de 22 marchés en temps réel. Concrètement, cela demanderait une automatisation du modèle d’attribution.
Je vois également l’intelligence artificielle prendre de plus en plus d’importance dans le paysage digital, notamment pour gérer les avis de clients et les mettre en regard de notre perception de marque. Elle permettrait également d’explorer de nouveaux territoires de marque et d’identifier de nouveaux concurrents.
L’innovation occupera toujours une place forte dans notre organisation, et l’intelligence artificielle viendra en soutien pour tenir la cadence et avancer à la bonne vitesse.