South by Southwest (SXSW), ou l’épicentre de la créativité et de l’innovation. Implanté dans la capitale texane depuis 1987, ce festival ose le mélange des genres : cinéma, musique et nouvelles technologies. Et, ça marche ! Dans cet édito, Olivier Vigneaux, président de BETC Digital, et Sébastien Houdusse, directeur général adjoint de l’agence, vous font revivre l’événement de l’intérieur. À travers leurs yeux et leurs mots.
Le célèbre festival qui se tient chaque année à Austin autour du digital et des nouvelles technologies avait cette année une couleur un peu spéciale, juste après l’élection de Trump. Entre une réflexion sur les conséquences du progrès technologique et la croyance toujours tenace dans les avancées de l’intelligence artificielle, SXSW se fait plus politique que jamais.
La tech pour le meilleur ?
Après la victoire de Donald Trump, que les intelligences artificielles sont peu nombreuses à avoir vu venir, le monde de la tech semble s’interroger sur les effets collatéraux du progrès technologique. Exemple frappant : quand on arrive à Austin, aucune trace d’Uber ou de Lyft. Ils ont été bannis par la ville, avec le soutien des citoyens. Et pourtant, très vite, de nouvelles plateformes ont fleuri et pris le relais, mettant au cœur de leur promesse l’idée que l’uberisation doit pouvoir profiter à tout le monde. Ainsi de Fasten, dont le positionnement est on ne peut plus clair : « Fasten does more than find you a ride in no time, we do it in a way that is fair for everyone ». La plateforme semblait incontournable, et pourtant l’exemple d’Austin montre que le facteur humain reste essentiel, et que la technologie ne peut tenter de résoudre tous les problèmes sans une réflexion citoyenne. Voilà qui est stimulant (et d’actualité) pour nous tous, n’est-ce pas ?
AI Everything.
On en parlait déjà l’année dernière, mais le sujet de l’intelligence artificielle et du machine learning continue d’occuper tous les esprits, et d’investir tous les secteurs. Que vous soyez avocat, publicitaire, agence media, artiste ou même psychologue, sachez que l’intelligence artificielle est déjà là, dans vos métiers pour vous remplacer dans certaines tâches, voire inventer de nouveaux usages. Prenez Replika, une startup qui vient de lancer un «AI friend». Car après tout, s’interroge sa fondatrice Eugenia Kuyda, qu’est-ce qu’un ami ? Quelqu’un qui est prêt à nous écouter, à discuter avec nous, à entendre et comprendre nos secrets, nos doutes et nos angoisses à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. Et bien, Replika est tout cela à la fois, disponible et à l’écoute 24h/24 et 7 jours sur 7 grâce à la magie de l’intelligence artificielle. Et quel ami peut rivaliser avec une telle disponibilité ?
Tout le monde en bots !
Les bots sont l’un des domaines concrets d’application de l’intelligence artificielle. Si les bots BtoC se développent à vitesse grand V en délivrant des résultats plus encourageants qu’il y a quelques mois (voyez XiaOice, bot conversationnel développé par Microsoft en Chine qui compte déjà 50 millions d’utilisateurs), on voit aussi fleurir de nouveaux usages avec les bots BtoB. Growthbot, un bot marketing nous donne ainsi instantanément accès à des datas sur notre référencement ou notre présence sur les médias sociaux par exemple. Et ce, avec une facilité qui change vraiment la donne. Avec des chatbots comme celui-ci, plus aucune excuse pour ne pas mettre la data au cœur de nos préoccupations, puisqu’elle est là, disponible et accessible dans l’instant !
Où est mon assistant ?
L’intelligence artificielle est aussi concomitante de la montée de la voix comme interface essentielle. Aux USA, Amazon a déjà vendu plus de 8 millions d’Echo et 20% des requêtes sont déjà vocales sur Android. Cela nous emmène dans une nouvelle ère qui va révolutionner le search, l’ère de l’assistance. C’est une transformation fondamentale qui est en train de s’opérer, sous les effets conjoints du mobile, du web sémantique, de la voix et de la personnalisation. L’ère de l’assistance, c’est un search qui devient plus itératif, plus conversationnel, dont on peut largement imaginer les effets notamment sur le e-commerce. Je ne vais plus chercher un nouveau T-shirt ou un nouveau pantalon mais demander à mon assistant de me trouver ce que portait Harry Styles lors de son dernier concert au meilleur prix… À lui de décider ensuite sur quel site e-commerce il ira l’acheter. Avec quelle transparence ? Vous imaginez les bouleversements à venir ?
Le cerveau, dernière frontière ?
La montée de l’intelligence artificielle pose évidemment la question de la place de l’intelligence humaine, et notre cerveau semble devenir une nouvelle frontière à explorer ; devra-t-il évoluer, lui aussi, pour s’adapter aux ordinateurs ? C’est précisément ce dont parle Bryan Johnson, fondateur de Kernel, qui évoque un « droit à l’évolution » pour notre cerveau, car il lui semble totalement improbable, dans une ère de progrès technologique intense, « d’avoir encore besoin de 8 heures pour lire un livre » ! C’est la même logique qui a conduit Elon Musk à investir dans la société Neuralink. Pour le milliardaire sud-africain, c’est en fusionnant notre cerveau avec des micro-processeurs que nous pourrons résister efficacement aux progrès faramineux de l’intelligence artificielle. Evidemment, tous ces champs de recherche ressemblent encore beaucoup à de la science-fiction, mais on voit déjà les premières applications des machines capables de détecter les signaux électriques de notre cerveau. Ainsi de Emotiv, un casque très léger qu’on porte sur la tête et qui nous permet de faire avancer une boule placée devant nous, seulement par la force de notre esprit. Bluffant !
Jamais offline ?
On le voit, les recherches et expérimentations vont de plus en plus loin, grâce aux progrès exponentiels de l’IA. Au point que l’on peut se demander si l’on ne sera bientôt plus jamais ‘offline’. Les satellites, dopés à l’IA peuvent traquer en temps réel les mouvements dans une région tandis que les objets connectés surveillent, également en temps réel, les mouvements dans une maison… Du plus grand au plus petit, l’IA est partout. Pour y prendre garde, Kate Crawford de Microsoft a créé AInow, qui se propose de réfléchir aux conséquences de ce mouvement et de repérer les utilisations qui vont trop loin. Ainsi, on a pu voir récemment en Chine, une IA qui prétendait pouvoir reconnaître des criminels, uniquement sur la base de photos. On se croirait presque dans Minority Report. Et cela repose évidemment la question de notre vigilance en tant qu’humains, de l’importance de savoir et pouvoir choisir quel futur nous avons envie de construire.